La Russie dans les années 1900
Début du XXe siècle
Il y a environ 150 millions d'habitants en Russie, dont plus de trois millions fixés à Petrograd et à Moscou[1]. 1.600.000 ouvriers. Disposant au début du 20e siècle d’un accroissement naturel supérieur à un million de personnes par an, la Russie est sans doute le pays le plus jeune d’Europe.
80 % de la population russe vit dans la misère.
La Russie est un pays agricole et arriéré composé pour 80 % de paysans, les moujiks. L’ancienne paysannerie des mirs a disparu pour donner naissance à des dizaines de millions de déracinés qui font de l’accès à la terre la question sociale centrale de la Russie. En moyenne, chaque paysan dispose d’une superficie cultivable inférieure à celle de 1861 (abolition du servage). Les moyens de travail font défaut : un tiers des paysans n’a qu’un cheval, un autre tiers n’en a pas du tout. Comment recourir à la banque des paysans qui prête à 8 % et sur garantie ? On vend la récolte dès l’automne pour payer dettes et impôts, et il faut ensuite acheter sa propre nourriture. Aux paysans qui ne partent pas vers la Sibérie et les villes, il ne reste qu’un espoir : le partage des grands domaines qui subsistent encore. Une petite minorité de paysans s’enrichit. Pour son âpreté, le “coq du village”, le koulak (en russe = le poing) est plus détesté que n’était le seigneur.
La bourgeoisie d’affaires joue un rôle assez faible. Le développement du commerce fait apparaître une petite et moyenne bourgeoisie dans les grandes villes du pays. Faiblesse de la bourgeoisie russe : 79 % des capitaux investis dans l'industrie sont d'origine étrangère.
Spectaculaire développement industriel. L’industrie est concentrée.
Les ouvriers sont relativement peu nombreux, 3 millions en 1900, 5 millions en 1914. Mais il sont concentrés dans quelques régions et dans quelques grandes usines : plus de la moitié travaillent dans des usines employant au moins de 500 personnes, proportion la plus forte d’Europe. Leurs salaires déjà très bas sont réduits d’un quart ou d’un tiers par les amendes et par l’obligation de se fournir à la coopérative de l’usine, qui vend très cher. Une partie du nouveau prolétariat rural réussit à être embauchée dans les usines qui se construisent à Moscou, Saint-Pétersbourg, Bakou ou Nijni Novgorod, contribuant à la formation d’une classe ouvrière qui regroupe peut-être jusqu’à quatre millions de travailleurs à la veille de la Première Guerre mondiale. Les conditions de logement sont désastreuses : beaucoup de familles ne disposent que d’un “coin”, c’est-à-dire d’un quart de pièce ! La journée de travail est de 13 à 15 heures ou même plus. La classe ouvrière russe dispose d’une forte combativité, en raison de son important degré de concentration.
Les nobles multiplient les fêtes somptueuses.
Le tsar de toutes les Russies, Nicolas II gouverne en autocrate absolu retranché dans son palais. Contrairement à de nombreux pays européens, la Russie ne possède au début du siècle ni Parlement, ni Constitution.
1900
Annexion russe de la mandchourie.
Lénine dénonce les commentaires racistes de Plekhanov sur les Juifs.
Le Bund déborde de son cadre lituanien et s'implante dans plusieurs cités russes méridionales.
> Le 19 janvier 1900, la période d'exil de Lénine s'achève. Il gagne l’Europe occidentale.
Trotsky se marie en prison avec Aleksandra. Il est transféré en Sibérie (Irkoutsk puis Oust-Koust) (- 1902). Il prend part à la fondation de l'Union de combat pour l'émancipation de la classe ouvrière.
> Le 24 décembre 1900 (11 en Russie) parution du premier numéro de l'Iskra (L'Etincelle), organe théorique des socialistes russes dirigé par Lénine et Martov. L'organisation social-démocrate est dirigée par Plekhanov, Lénine et d'autres militants.
1901
Le 1er mai, manifestation à Tiflis (Géorgie).
Quatrième congrès du Bund. La position du sionisme est longuement débattue. Le sionisme fait contre lui la quasi-unanimité des congressistes. Près de mille bundistes sont arrêtés, détenus et déportés.
Grève des ouvriers brossiers, profession ou tous les ouvriers et payerons sont juifs.
En juillet, un parti ouvrier juif soutenu et subventionné par le chef de l'Okhrana à Moscou, Sergueï Zoubatov, est formé. Pour le gouvernement tsariste, il s'agit de démoraliser le mouvement ouvrier juif de l'intérieur en y introduisant ses agents.
1902
302 entreprises emploient plus de mille ouvriers par entreprise.
Fin de la réalisation du Transsibérien. On peut désormais traverser la Sibérie sur plus de 6.000 km en 8 jours. C’est une impulsion décisive pour la mise en valeur de la Sibérie qui développe ses envois de produits agricoles et qui peut enfin servir de débouché à la population surabondante de la Russie d’Europe.
Un tiers de la Russie est placé sous “surveillance renforcée”. Les armées de la police publique et secrète sont en accroissement constant. Les prisons et les bagnes sont peuplés de milliers de prisonniers politiques. Dans toutes les villes et centres industriels, les soldats sont lancés contre le peuple avec leurs armes chargées.
Vladimir Oulianov prend le nom de Lénine. Dans le projet de programme du POSDR, Lénine consigne dans la thèse XI que « le développement des échanges internationaux a créé entre les peuples du monde des liens si étroits que le mouvement ouvrier contemporain devait devenir international et l’est déjà devenu. La social-démocratie russe se considère comme une partie de la social-démocratie internationale ».
Lénine dénonce l’affirmation du Bund selon laquelle l’antisémitisme a pénétré la classe ouvrière, malgré le fait que les sociaux-démocrates d’Odessa ont interdit l’adhésion des Juifs afin d’éviter de s’aliéner les travailleurs russes antisémites.
Création du Parti socialiste révolutionnaire (SR) par Victor Tchernov. Il s'inscrit dans la ligne d'un socialisme russe populiste, anarchisant, plus spécifiquement agraire. Ils promettent une grande réforme agraire avec la collectivisation du sol dans le cadre du mir, la collectivité villageoise russe.
Victor Tchernov
> En mars 1902, Lénine publie Que faire ?, condensé des conceptions organisationnelles de Lénine : "Donnez-nous une organisation de révolutionnaire, et nous bouleverserons la Russie !”
> En avril 1902, Staline est arrêté et déporté.
> Le 1er mai 1902, à Vilna, des militants ouvriers sont fouettés à coups de verges, comme des serfs, par les autorités.
> L’idée d’une vaste conspiration juive est émise dans le Protocole des sages de Sion, un document fabriqué par la police secrète du tsar de Russie Nicolas II en vue de justifier sa politique antisémite. L'ouvrage se présente comme un plan de conquête du monde établi par les Juifs et les francs-maçons. Découvrant qu’il s’agit d’un faux, le tsar récuse le texte ce qui ne l’empêche pas de circuler dans le monde entier. Le 6 et 7 avril, pogrome antisémite de Kichinev en Moravie, soigneusement préparé par l'administration bessarabienne. En juin, cinquième congrès du Bund à Zurich. Le Bund compte 30.000 membres. Le tactique de la "vengeance organisée", considérée comme du terrorisme est rejetée.
> Staline se marie avec une Géorgienne profondément croyante. Le 29 juillet, Staline est condamné à 3 ans d'exil en Sibérie.
> En février, Lénine à Munich achève Que faire ? Les questions brûlantes de notre mouvement. En mars, Plekhanov rejette la proposition de Lénine de coopter Lev Davidovitch (Trotsky) à la rédaction de l'Iskra (Étincelle). Lénine, le 15 juillet, écrit Le problème national dans notre programme où il défend l’idée de l’autodétermination des nations.
> Du 30 juillet au 23 août (17/07-10/08 en Russie), IIe congrès du Parti ouvrier social démocrate russe (POSDR) à Bruxelles puis à Londres. Scission sur des questions d'organisation entre les bolcheviks ("majoritaires", Lénine) et les mencheviks (“minoritaires”, Martov, Plékhanov) à propos d'un mot de l'article I des statuts qui définit les modalités d'appartenance au parti. Martov et Axelrod proposent un parti large ouvert aux simples sympathisants, Lénine un parti de “révolutionnaires professionnels”, restreint à une avant-garde de militants, clandestin, centralisé, discipliné. Lénine quitte la salle avec la majorité (bolcheviks) et quitte la rédaction de l'Iskra. Trotsky, d'abord fidèle à Lénine, se range du côté des mencheviks. Il rejette l'existence d'un statut spécial dans le POSDR pour le Bund. Le Bund est plus puissant que les autres sections du POSDR réunies. Le Bund est contraint de quitter le POSDR car on lui refuse son autonomie. Ce départ permet à Lenine d'être majoritaire.
> En septembre,Trotsky rédige le Rapport de la délégation sibérienne. Trotsky est élu à la direction menchevik et recommence à travailler à l'Iskra, reprise aux bolcheviks grâce à Plekhanov qui a rejoint les mencheviks. Mi-octobre, Trotsky, exilé en Sibérie, s'échappe et se réfugie à Londres où il retrouve Lénine et adhère à l'organisation social-démocrate. Il y rencontre Natalia.
1904
Ouverture du transsibérien.
Dépression économique, montée du chômage. 80 % de la population russe vit dans la misère.
Le conseiller Pobiédonostsev voit Nicolas II sur le point de faiblir, il lui répète : “ Tu as le droit de tout faire selon ton intelligence et ton cœur mais tu n’as pas le droit de violer ton serment sacré de conserver l’autocratie. N’oublie pas, ô Tasar que tu es l’Oint de Dieu “.
La fin de l’autonomie du grand-duché de Hollande entraîne l’assassinat du gouverneur russe par un jeune révolutionnaire.
Le moine itinérant réputé Raspoutine arrive à Saint-Pétersbourg pour la première fois. A Saint-Pétersbourg, le luxe des boutiques, le faste des palais et l’éclat somptueux des églises, tout comme l’omniprésence diffuse du pouvoir impérial, font forte impression sur le fils de paysan qu’est Raspoutine.
Il règne dans les salons de la noblesse une atmosphère de fin du monde mais aussi une grande affinité pour le surnaturel et le spiritisme sous toutes ses formes.
Raspoutine est réputé pour arrêter le saignement des plaies. Raspoutine est invité aux réceptions de la noblesse où il est présenté comme un homme de Dieu. Il est accompagné d’une cohorte de fidèles qui boivent ses paroles comme si chacun de ses mots étaient une révélation divine.
Il se présente au monastère Alexandre Nevski avec une lettre de recommandation.
⇨ En février 1904, Staline rentre de déportation.
> Le 8 février 1904, le Japon attaque par surprise la flotte russe du Pacifique à Port-Arthur, bastion extrême-oriental de l'empire. La guerre russo-japonaise (- septembre 1905) est impopulaire : à l'incapacité et la corruption des milieux dirigeants s’ajoutent les deuils, les privations et les échecs. Victoire des Japonais à Tsoushima. La flotte russe de la Baltique est coulée. Les Japonais obtiennent un protectorat sur la Corée.
La nouvelle défaite de la Russie contre le Japon met en évidence le retard technologique de l’armée russe et les graves insuffisances de son commandement. L'invincibilité des armées russes apparaît comme un mythe. Après avoir claironné qu’il allait écraser « les insolents macaques» japonais, Nicolas II est contraint à signer une capitulation qui affaiblit considérablement son prestige et son autorité. C’est la première fois qu’un peuple “blanc” est battu par un peuple “jaune”. La série des défaites militaires commande celle des troubles intérieurs.
En Sibérie, des déportés politiques protestent avec énergie contre leurs conditions de détention et le travail forcé. Barricadés, ils essuient pendant deux semaines le feu des militaires et des policiers. Symbole de la lutte contre le despotisme, leur geste soulève une profonde émotion en Russie.
⇨ Le 28 juillet 1904, le ministre de l'intérieur, Von Plehve, est déchiqueté par une bombe lancée par un socialiste-révolutionnaire.
Rosa Luxemburg publie « Questions d’organisation de la social-démocratie russe » dans l’Iskra.
⇨ Le 12 août 1904, naissance très attendue du fils de Nicolas II qui a déjà eu quatre filles. Il est hémophile, ce qui est un secret d’Etat. La moindre blessure pourrait lui être fatale. L’impératrice Alexandra Feodorovna consacre désormais sa vie à protéger le tsarévitch. Elle est culpabilisée. Profondément croyante, elle s’entoure pourtant de guérisseurs et de charlatans, elle devient instable.
⇨ En octobre 1904, Trotsky quitte le groupe menchevique , mais reprend sa collaboration à l'Iskra. Il publie une brochure, Nos fins politiques, dans laquelle il oppose au "jacobinisme prolétarien" de Lénine une conception socialiste de la démocratie révolutionnaire.
⇨ En novembre 1904, de nombreuses manifestations, ouvriers et classes moyennes mêlés, se tiennent dans les grandes villes pour la liberté politique, une constitution, un gouvernement représentatif (- décembre).
⇨ Du 13 au 31 décembre 1904 (calendrier russe), un puissant mouvement de grève soulève les ouvriers du pétrole de Bakou et s'achève par un succès historique : paiement des jours de grève et signature d'une convention collective instaurant la journée de 9 heures[2]
> Le prolétariat compte 2.700.000 ouvriers.
> Le commerce extérieur atteint un montant six fois plus élevé qu’en 1860. Malgré les achats d’équipements, l'exportation massive de céréales, dont la Russie est le premier fournisseur mondial, lui procure encore un substantiel excédent commercial.
> Pogromes antisémites. Vague de pogromes antisémites commis par les Cent-Noirs. Le seul mois d'octobre compte 690 pogromes qui font plus de 3.000 morts parmi les juifs. Les partis ouvriers juifs forment des groupes d'autodéfense. Congrès du Bund en Suisse.
> Les jacqueries paysannes se multiplient en Ukraine.
> Le biologiste Constantin Mereschkowsky propose pour la première fois que certaines cellules puissent provenir de l’union de deux cellules. Une cellule “hétérotrophe”, qui a besoin d’engouffrer des nutriments pour se procurer de l’énergie, aurait absorbé une cyanobactérie photosynthétique, laquelle, au lieu d’être digérée par son prédateur, serait restée active dans le cytoplasme, où elle aurait fourni de l’énergie à son hôte.
> Des émeutes éclatent début 1905. Le 3 janvier, une grève éclate dans les usines d’armement Poutilov de Saint-Pétersbourg. Les ouvriers des autres usines de la capitale votent l'organisation d’une manifestation de solidarité. Ils décident d’adresser au tsar une supplique qui, bien que respectueuse de l’ordre établi, lui demande d’entendre les souffrances de son peuple. Le dimanche 9 janvier du calendrier julien (le 22 janvier occidental) , les travailleurs se rassemblent dès l’aube et prient pour que la journée se déroule pacifiquement. 150.000 travailleurs marchent pacifiquement en colonne depuis divers quartiers de la ville vers le Palais d’Hiver dans l’intention de remettre une supplique au tsar. Parmi eux, les ouvriers de l'usine Poutilov de Saint-Pétersbourg. Ils sont sous la conduite du pope Gapone (personnage qui fraye à la fois avec les socialistes révolutionnaires et la police impériale) et viennent présenter, arborant le portrait du tsar, la supplique respectueuse et silencieuse devant le Palais d'Hiver. Le tsar ne se trouve pas au Palais d’Hiver. Le cortège ressemble plus à une manifestation religieuse qu’à une manifestation ouvrière. Les femmes et les enfants sont aux premiers rangs. Sur une grande bannière blanche : “les soldats ne tirent pas sur le peuple”. Le tsar Nicolas II fait tirer par les cosaques sur la foule pacifique de plus avec leurs enfants. Plus de 200 morts et 5.000 blessés jonchent le sol. Ce jour est baptisé dimanche rouge. Gapone : “Il n’y a plus de dieu, il n’y a plus de tsar”. L’impression est profonde et durable. Le peuple rejette la responsabilité du massacre sur son souverain. Ce jour-là, Nicolas II tue chez les ouvriers russes, à peine sortis de la campagne, l'idée que le "petit père" n'était pas responsable des maux de l'Empire. Il devient “Nicolas le sanglant”. Le peuple perd tout sentiment de vénération envers le tsar, il chante dans les rues : “ Vaincu des Japonais, victorieux des Russes, sois maudit, Tsar souillé de sang !”. Cette répression suscite une grève générale. A partir du 11 janvier 1905, les grèves vont se multiplier (- octobre). Début de la révolution salué par Trotsky. Un climat insurrectionnel se développe principalement dans la Russie occidentale, en Lituanie, en Lettonie, en Pologne, en Biélorussie et en Ukraine. En février, Trotsky, rentré clandestinement en Russie, est à Kiev. Le 17 1905, le grand-duc Serge Alexandrovitch est tué à Moscou par un socialiste-révolutionnaire. De mars à mai, le mouvement s'intensifie. Le pouvoir créé le Cent-Noirs, ramassis de hooligans dont la mission est de provoquer systématiquement des pogromes. En mars, les ouvriers du textile d'Ivanovo constituent le premier soviet de l'histoire. En mai, les libéraux, d’origine bourgeoise ou noble, s'organisent. Ils créent le parti constitutionnel-démocrate (K.D. = “cadet”), représentant la bourgeoisie. Ils réclament une Assemblée Constituante et des institutions. Le 14 juin, les troubles gagnent la flotte de la mer Noire. Mutinerie du cuirassé Potemkine à Odessa. L’équipage se rebelle, tue sept officiers et hisse le drapeau rouge. La révolution a gagné le cœur de la machine militaire tsariste. Les bolcheviks, alliés aux mencheviks et au Bund, déclenchent une grève générale. Nicolas II est obligé de faire des concessions. C’est le dernier baroud d’honneur d’une dynastie à bout de souffle. Le 6 août le pouvoir propose d'écrire une Constitution avec une Douma délibérative élue au système censitaire. Les mencheviks (Martov) se disent intéressés. Les bolcheviks et le Bund veulent boycotter.
⇨ Du 25 avril au 10 mai (12-27/04 en Russie), IIIe Congrès du POSDR à Londres (purement bolchevique).
Conflit entre Lénine et les komitetchiki. En juin, les bolcheviks tentent de prendre la direction du mouvement insurrectionnel. Des soviets locaux sont créés. Premier soviet de députés ouvriers constitué à Ivanovo-Voznesensk.
> L’Union paysanne pan-russe réclame la propriété collective de la terre.
> Le 5 septembre, le tsar signe la paix négociée par Witte (traité de Portsmouth) avec le Japon après une guerre désastreuse pour la Russie. C'est la première guerre moderne remportée par une puissance asiatique sur un État européen.
> Du 20 au 22 septembre (du 7 au 9 en Russie), conférence des organisations social-démocrates de Russie à Riga.
Une partie du soviet de Saint-Pétersbourg en 1905 (Trotsky au centre).
⇨ Du 4 au 10 octobre, nouvelle vague de grèves à Saint Pétersbourg sur l'initiative des bolcheviks. Le 13 octobre, une grève générale paralyse le pays. Le 17 octobre (30 octobre en Occident), Trotsky est élu à l'exécutif du soviet de Saint-Pétersbourg.
Le 30 octobre, l'ampleur des grèves et des mutineries oblige à contrecœur Nicolas II à promulguer un manifeste garantissant les principales libertés : l'amnistie des prisonniers politiques, la liberté de réunion, la liberté de la presse). (association, parole, culte). Le manifeste est lu à haute voix dans la salle du trône du Palais d’Hiver. Ces mesures qui sont des nouveautés en Russie sont accueillies dans la liesse populaire. Il promet la réunion d'une Douma (en russe = la pensée) d'État élue au suffrage masculin. Le tsar continue d’exercer son droit de veto sur la Douma. Le 26 octobre (13/10 au calendrier russe), naissance, dans le cours de la grève, du premier soviet des députés ouvriers de Saint-Pétersbourg. Trotsky y prend la parole sous le pseudonyme de Ianovsky. Les Soviets sont formés de délégués élus par l'ensemble des ouvriers d'une entreprise, révocables à tout moment et fédérés. En novembre, Lénine arrive à Saint-Pétersbourg. Trotsky est devenu l'inspirateur, la plume et l'orateur du soviet. Il fonde, avec Parvus, la Rousskaya Gazeta (Gazette russe) et collabore au journal menchevique Natchalo (Commencement) qui s'identifie à sa politique. Des insurrections ouvrières se produisent dans les derniers mois de 1905 dans les grands centres industriels où se sont constitués des soviets de députés ouvriers, tandis que des groupes armés d'extrême droite (les Cent-noirs) massacrent Juifs et révolutionnaires. Le 6 novembre, gouvernement de Serge Witte (- 1906). En décembre, écrasement de la révolution. Le gouvernement, un moment affaibli, recouvre progressivement son ancien pouvoir grâce au loyalisme envers le tsar d'une grande partie de la paysannerie. Le 3 décembre (16 décembre en Occident), Trotsky et les autres dirigeants du soviet sont arrêtés. Le soviet de Saint-Pétersbourg est dissous.
Mi décembre, on observe un reflux très net de la révolution. Du 19 au 30 décembre (du 6 au 12 en Russie) grève générale et insurrection à Moscou. Witte se sent assez fort, au milieu de la lassitude générale pour rétablir l’ordre. L’insurrection est écrasée après huit jours de combat.
> Du 25 au 30 décembre (12-17 en Russie) première conférence du parti à Tammerfors (Finlande). A la faveur des événements révolutionnaires, les partis socialistes connaissent une croissance spectaculaire.
1906
Retour à l’autoritarisme (- 1911).
Une réforme agraire est mise en place par le gouvernement Stolypine. En supprimant les anciennes communautés paysannes au profit d’une économie de marché, ces réformes donnent naissance à une nouvelle couche de petits propriétaires terriens, mais aussi à un prolétariat agraire qui, se trouvant brutalement privé de terres, n’a d’autre solution que de partir vers les villes et les vastes espaces sibériens ou d’entrer dans la domesticité agricole.
En prison, Trotsky formule la théorie de la révolution permanente. Il écrit la brochure Bilan et perspective.
En février 1906, naissance à Saint-Pétersbourg du fils de Trotsky, Léon Sedov.
Une fois le danger passé, le tsar se refuse à gouverner en souverain constitutionnel : “ J’en ai assez de l’expérience de l’année dernière dont je me souviens comme d’un cauchemar “. En février et mars, Nicolas II cherche à limiter les concessions qu'il a dû accorder, en réorganisant le Conseil d'État, dont il fait une chambre haute statuant des projets adoptés par la Douma, et en promulguant les lois fondamentales.
Au printemps, Nicolas II met en place une assemblée représentative, la Douma, comme il s’y est engagé au plus fort de la vague révolutionnaire de 1905.
En mars 1906, Élections à la Douma peu démocratiques (organisées en curies selon la classe sociale défavorisant considérablement la classe ouvrière, les femmes ne peuvent pas voter). La première Douma, caricature de Parlement.
Le POSDR et le Bund boycottent les élections.
Le Douma est dominée par les KD, constitutionnels démocrates (37 %, 170 députés), renforcés par les allogènes (Polonais, Ukrainiens, Baltes et musulmans). Derrière eux viennent les travaillistes (Trudoviki) avec 100 députés, les S-R élus par les paysans malgré les consignes de boycott, et les sociaux-démocrates (18 députés, en majorité mencheviks).
La Douma se réunit au Palais Tauride à Saint-Pétersbourg.
Les KD sont attachés à la stabilité de l’Empire et non qu’une demande c’est que le gouvernement soit responsable devant la Douma.
Malgré tous ses efforts pour contrôler les élections, le tsar se rend compte que l’assemblée ne lui est pas favorable. Pour lui, il n’a de compte à rendre qu'à dieu et pas à la Douma. Le divorce entre le tsar et la Douma est inévitable.
Durant les mois de la première Douma, les mises à sac des propriétés foncières prennent une ampleur considérable.
Le 25 avril 1906 (10/04 en Russie) IVe congrès du POSDR dit "d'unification" à Stockholm (- 8 mai). La social-démocratie russe vote en faveur de la réadmission du Bund comme organisation social-démocrate du prolétariat juif.
Pogrome de Bialystok, 80 morts, organisé par les autorités. La Douma exige la démission de Stolypine.
En juillet 1906, tentatives de soulèvements parmi les soldats à Sveaborg et Cronstadt. Elles sont écrasées.
Le 8 juillet, Nicolas II renvoie Witte et donne sa confiance au ministre autoritaire Stolypine (- 5/09/1911) qui va gouverner en dictateur.
Stolypine
Stolypine va ordonner de nombreuses exécutions, la corde du bourreau reçoit le surnom de “ cravate de Stolypine “.
Le 8 juillet, Nicolas II dissout par un ukase la Douma, moins de deux mois et demi après sa convocation, se sentant incapable d’accepter la concurrence d’un pouvoir parlementaire.
Fin août 1906, congrès du Bund.
Le 2 octobre 1906, ouverture du procès contre les membres du soviet de Pétersbourg.
En novembre 1906, la grande idée du premier ministre Stolypine est de gagner au régime la masse des paysans en les autorisant à quitter la communauté du mir et à devenir pleinement propriétaires. Par là il espère les rendre conservateurs et transformer en vingt ans la physionomie du pays. Mais la réforme profite surtout aux koulaks.
Le 8 novembre, Trotsky est condamné au bannissement à vie.
Du 16 au 20 novembre (03-07 en Russie) IIe conférence du parti bolchevique à Tammerfors (Finlande).
1907
Élection pour la IIe Douma.
Mort de la femme de Staline d'une pneumonie.
Le 10 janvier, début du transfert de Trotsky vers le cercle polaire.
Le 25 février, Trotsky s'évade et prend le chemin de Saint-Pétersbourg dans un traîneau à rennes.
Fin février, la seconde Douma se réunit.
Du 13 mai au 1er juin (30/04-19/05 en Russie), Ve congrès unifié du POSDR (bolcheviks et menchevik) à Londres. Il se distingue par le nombre extraordinaire de présents : 302 délégués. Les bolchéviks sont 90, les mencheviks 85. En un an la section russe du parti est passée de 31.000 à 77.000 membres. Le Bund, représentant le mouvement ouvrier juif, a 56 délégués. Des discussions houleuses opposent bolcheviks et mencheviks au sujet de la préparation d'une insurrection armée. Les bolcheviks retrouvent la majorité. Trotsky se prononce toujours pour l'unité des bolcheviks et des mencheviks mais critique violemment la politique des "expropriations" des bolcheviks, des attaques de fourgons postaux ou bancaires pour terroriser les serviteurs de l'Etat et remplir les caisses du parti (Staline est l'un des "expropriateurs").
Le 3 juin (16 juin en Russie), la deuxième Douma est dissoute par Stolypine par un "coup d'Etat".
Une nouvelle vague de réaction déferle sur le Russie (loi martiale, emprisonnements, condamnations à mort).
Dans la troisième Douma, dite “Douma des Seigneurs” (- 1912), le bloc gouvernemental a les deux-tiers des élus grâce à une modification illégale du régime électoral qui assure la prépondérance aux grands propriétaires.
Du 21 au 31 juillet (03-05/08 en Russie) : IIIe conférence de parti bolchevique à Kotka.
Du 18 au 25 novembre (05-12/11 en Russie) : IVe conférence du parti bolchevique à Helsingfors.
1908
Une période de réaction s'ouvre.
Les nombre moyen de grévistes par an tombe.
Alexandra Kollontaï s’exile devant les menaces d’arrestation par la police du tsar.
1909
La Bosnie est annexée par l’Autriche. La Russie en est humiliée.
Élection de la 4e Douma.
Du 3 au 9 janvier (21-27/12 1908 en Russie), Ve conférence du Parti bolchevique à Paris.
Du 27 au 30 juin (14-17/06 en Russie), comité de rédaction élargi du Prolétaire à Paris : scission entre bolcheviques, otzovistes et ultimatistes.
Lénine écrit « De l’attitude du parti ouvrier à l’égard de la religion ».
[1] Léon Trotsky, Histoire de la révolution russe.
[2] Jean-Jacques Marie. Staline Librio.