Le Chili dans les années 2010
Ressources
Le Chili est le premier producteur mondial de cuivre. Il représente 50 % des exportations et 18 % du PIB. La Chine est le premier client. Codelco est le plus grand producteur du monde. Pilier de l'économie, cette ressource est aujourd'hui majoritairement aux mains de concessions étrangères (www.defensadelcobre.cl). Le chili est aussi un grand producteur de lithium (batteries).
2010
Paul Shäfer meurt en prison à Santiago.
En janvier, intronisation comme président du patron milliardaire Sebastián Piñera (- 2014), le « Berlusconi chilien » (53 % des voix).
Sebastián Piñera
> Le 27 février 2010, tremblement de terre de magnitude 8,8 suivi d'un tsunami. 521 morts.
> En octobre 2010, sauvetage de 33 mineurs qui ont passé 70 jours enterrés suite à un éboulement dans la mine de cuivre et d'or San José (nord Chili). La solidarité populaire est largement instrumentalisée par le gouvernement ultralibéral de Sebastian Piñera.
2011
Croissance PIB : 6 %
> En avril 2011, cinq ans après la lutte des lycéens, les étudiants reprennent le flambeau de la révolte. Conscients que la marchandisation de l'éducation favorise la reproduction des inégalités, ils s’insurgent contre le coût exorbitant des études supérieures.
Manifestations massives des étudiants pour la gratuité et la qualité de l'éducation publique. Arrestations massives. De nouveaux dirigeants émergent de la lutte.
> En juin 2011, 80 000 étudiants, lycéens et enseignants manifestent à Santiago, dans une des plus fortes mobilisations de rue depuis 2006, pour réclamer des moyens accrus dans le système d'Éducation qui a été largement privatisé par la dictature du général Pinochet. Les étudiants réclament de meilleures conditions de financement et d’accès à l’enseignement supérieur, les lycéens revendiquent la gratuité et de meilleures conditions matérielles. Leur véritable revendication est contre la communauté scolaire, l’autoritarisme, la pression permanente pour la réussite, la compétition individuelle.
Après des mois de conflit, les étudiants arrachent quelques conquêtes. Ils ont surtout montré que leur mobilisation pouvait payer.
2012
> En avril 2012, création du Mouvement Libres del Sur, organisation révolutionnaire.
> En août 2012, après une trêve de plusieurs mois, 130.000 étudiants manifestent de nouveau pour réclamer la gratuité et la qualité de l'éducation publique.
> En octobre 2012, élections municipales. Échec de la droite.
2013
Croissance : 4,4 %
Chômage : 5,5% (OCDE). Touche particulièrement les jeunes.
Tournant à droite du Parti communiste qui négocie avec la Concertation pour avoir des sièges assurés au Parlement.
En mai, le parti Igualdad se transforme en parti à caractère national. Il est anticapitaliste et son mot d’ordre est « Que el pueblo mande » (Que le peuple décide).
> En décembre 2013, élection présidentielle. Michelle Bachelet est réélue après avoir promis pendant sa campagne d’utiliser l’argent du cuivre pour rendre les universités gratuites.
Michelle Bachelet
2014
En mars, nouveau gouvernement de centre-gauche.
Les centrales thermiques, alimentées par le charbon, surtout, et le gaz importé, fournissent plus de la moitié de notre électricité. La part renouvelable se résume essentiellement à l’hydroélectricité (34 %).
2015
> En mai, démission du gouvernement suite à un scandale immobilier où le fils de la présidente est impliqué.
2016
Un journaliste présentateur du journal télévisé est débarqué parce qu’il ose parler du pisco péruvien. Les producteurs de pisco du pays, la boisson alcoolisée nationale, l’accusent d’avoir trahi sa mission d’information du peuple chilien.
Luttes pour le système de retraite qui passe d’un système de répartition à un système de capitalisation. Les fonds de pensions privés sont en position oligopolistique et perçoivent des frais de gestion très élevés.
2017
Le nombre d’étrangers a triplé en dix ans, passant de 154 643 personnes en 2006 à 465 319 en 2015. Parmi les nouveaux venus, des Haïtiens, arrivés dans un pays où la population noire était quasi absente.
Autorisation de l’avortement thérapeutique malgré l’opposition de la droite et de l’Eglise catholique dont l’influence au sein de la sphère politique reste très importante. L’avortement est désormais autorisé seulement dans trois cas précis : risque pour la vie de la mère, viol et non-viabilité du fœtus.
Le Chili possède 52 % des réserves mondiales connues de lithium, utilisé dans les batteries des voitures électriques.
À une vingtaine de kilomètres d’Antofagasta, une centrale photovoltaïque de 217 hectares est mise en service au milieu du désert, pour une puissance de 50 MWh. Energie solaire : 5 % de l’électricité.
> Le 9 février 2017, début de la grève des mineurs de la mine de cuivre d’Escondida, une des deux plus importantes du monde, sur des questions de salaire.
> En novembre 2017, la candidate de la coalition de gauche Frente Amplio obtient 20 % des votes au premier tour de l’élection présidentielle. Cette coalition réunit une douzaine de partis de gauche. Ses principaux dirigeants sont les ex-dirigeants de la mobilisation étudiante de 2011.
Jose Antonio Kast, candidat d’extrême droite, pro-Pinochet, obtient 8 % des voix en prônant la fermeté contre les migrants.
Victoire du conservateur et milliardaire Sebastian Piñera (55 %) qui bat au second tour le candidat de gauche Alejandro Guillier.
Sebastian Piñera
2018
Michelle Bachelet est intronisée haut commissaire des droits de l’Homme à l’ONU pour un mandat de quatre ans.
> En janvier 2018, le gouvernement décide de sortir du charbon. Le groupe français Engie possède 9 centrales charbon dans le pays et une en construction.
> En mars 2018, Sebastian Piñera accède à la présidence, succédant à Michelle Bachelet. C’est un ancien homme d’affaires devenu milliardaire.
Sebastian Piñera
> Le 18 mai 2018, l’ensemble de la hiérarchie de l’Église chilienne présente sa démission au pape. 158 évêques, prêtres ou laïcs membres de l’Église catholique sont visés par une enquête ou ont été jugés pour abus sexuels sur des mineurs ou des adultes depuis 1960. Un grand nombre d’évêques seraient impliqués de près ou de loin dans des affaires.
> En novembre 2018, un jeune indien Mapuches est tué par un commando d'élite de l'armée.
2019
Les écarts de revenus sont gigantesques au Chili. 1 % de la population concentre un tiers des richesses.
Au Chili, le coût de la vie est équivalent à celui d’un pays européen alors que la moitié des salariés gagnent environ 500 € par mois. Les familles ouvrières et de la classe moyenne sont surendettées, notamment pour payer les études des enfants. Ces familles ne peuvent offrir des études supérieures à leurs enfants car les universités publiques coûtent au moins 300 € par mois.
L’inégalité sociale limite l’accès aux soins. La couverture de l’assurance maladie est insuffisante et les mutuelles privées trop chères. En cas de maladie grave, il faut emprunter pour se faire soigner.
La moitié des retraités chiliens reçoivent une pension dérisoire. Un enseignant reçoit une retraite de 150€ par mois.
Partout dans le pays domine un sentiment d’inégalité.
Une augmentation du prix des transports publics va mettre le feu aux poudres
> En octobre 2019, Sebastian Piñera augmente le prix du ticket de métro de 30 pesos (équivalent de 3 centimes d’euros).
Cette hausse des tarifs de transport va provoquer un mouvement de révolte contre le modèle économique et la Constitution qui le maintient en vigueur.
Une fois encore, la jeunesse est à l’avant-garde du mouvement. Les étudiants et lycéens appellent à ne pas payer le métro de Santiago et celui-ci doit fermer. Ils envahissent les rues de la capitale.
C’est l’explosion, spontanément, le Chili s’embrase et connaît une mobilisation sociale sans précédent, violemment réprimée, pour dénoncer notamment le coût de la vie et les inégalités.
La rage des citoyens enfle.
> A partir du 18 octobre 2019, plus d'un million de manifestants descendent quotidiennement dans les rues.
> Le 25 octobre 2019, La Plaza Italia à Santiago est envahie. Un million et demi de manifestants rien qu’à Santiago. La place Italia est rebaptisée Place de la Dignité.
Le peuple descend courageusement dans la rue pour s’opposer au système. Les manifestants protestent contre les inégalités sociales dans le domaine de l'Éducation, de la santé et des retraites. Les revendications s’élargissent. La contestation gagne de l’ampleur. Les mouvements indigènes et féministes se joignent à la révolte
Au cœur des revendications : la démission du gouvernement de droite de Sebastian Piñera.
Une fois encore, le pouvoir a recours à la force. Le pouvoir décrète l'État d’urgence. Pour la première fois depuis la dictature, l’armée est déployée dans les rues. La police utilise systématiquement des tirs de balles en caoutchouc ou de chevrotine, des gaz lacrymogènes délétères asphyxiants et pulvérise de l’eau qui contient des produits chimiques et qui provoquent des brûlures. Ils font des tirs tendus rapprochés en visant les yeux. 240 personnes sont gravement blessées aux yeux. Les yeux crevés deviennent le symbole du mouvement.
En un mois, la crise sociale fait 30 morts tués par les forces de l'ordre, 12.000 blessés dont 2.000 par armes à feu. 110 personnes sont torturées et certaines en meurent.
La colère ne cesse de grandir. Les Chiliens manifestent chaque jour pendant des semaines. Aux quatre coins du Chili, des réunions citoyennes s’organisent où les gens partagent leur vision d’une société plus juste.
Les manifestants accusent l’ensemble du système chilien hérité de la dictature militaire d’Augusto Pinochet de creuser les inégalités sociales et économiques du pays. Ce modèle prend sa source dans la Constitution chilienne.
Enlisé dans un rapport de forces défavorable, le président Sebastian Piñera cède à la pression populaire.
Sebastian Piñera recule et demande pardon, annonçant des mesures sociales.
Rien n’y fait, la population réclame une nouvelle Constitution et veut un référendum pour que le peuple décide seul sans l'avis du Parlement.
⇨ Le 10 novembre 2019, le président Sebastian Piñera propose de modifier la Constitution. Pour la première fois, l’héritage de Pinochet est remis en question.
> Le 12 novembre 2019, grève générale.
Le centre de Santiago est pris d’assaut par les manifestants. Les manifestants réclament la démission du président Piñera et une meilleure redistribution des richesses.
> Le 15 novembre 2019, la quasi-totalité des partis présents au Parlement (de la gauche jusqu’à l’extrême droite) signe un « Accord pour la paix sociale et une nouvelle Constitution ». Les partis s’accordent pour organiser un référendum en avril 2020 pour une nouvelle Constitution pour remplacer celle héritée de Pinochet.