La Russie en 1917
Le calendrier russe (grégorien) est en retard de 13 jours sur le calendrier moderne (juilien).
Environ deux millions d'ouvriers en Russie.
Les paysans soldats sont dix millions : 7 millions de combattants et 2,5 millions pour les unités de réserve et de garnison. 1,8 millions sont tués 3 millions prisonniers ou blessés.
Même si l’état des statistiques russes ne permet pas de disposer de données précises, la majorité de la population russe a très certainement moins de vingt ans, ce qui n’était pas sans conséquence sur les dynamiques sociales.
Le petit Parti bolchevik rassemble autour de 2.000 militants plus les nombreux exilés mais commence à recruter largement, surtout des ouvriers[1].
Janvier 1917 (calendrier russe)
Début de collaboration de Trotsky à Novy Mir (Nouveau monde) avec Boukharine.
Lénine, exilé à Zurich, déclare, devant une assemblée d'ouvriers suisses, qu'il ne verra certainement pas aboutir la révolution en Russie de son vivant.
Le 9 janvier (en Russie), des meetings de rues et une grève des imprimeurs commémorent l’anniversaire du “dimanche rouge” de janvier 1905.
De grandes grèves secouent Petrograd et d’autres villes où la colère suscitée par le faible niveau de vie s’ajoute à l’hostilité à la guerre et à l’opposition au régime tsariste.
Février 1917 (calendrier russe)
Refus massif de la guerre.
> 14 février selon le calendrier russe (27 février).
Ouverture de la quatrième et dernière session de la dernière Douma.
Les grandes usines à Pétrograd, en manque de combustible et de matières premières, mettent les ouvriers au chômage.
Grèves spontanées à Petrograd des ouvriers des usines avec environ 90.000 grévistes.
Interdiction des manifestations à Pétrograd.
Les prix montent, l'approvisionnement de la capitale se dégrade.
> 16 février calendrier russe (29 février)
La ville de Petrograd ne dispose de réserves de farine que pour quelques jours. Les autorités de Petrograd mettent en place un système de rationnement et décident d'introduire à Petrograd les "cartes de pain". Les stocks de charbon s'épuisent.
18 février calendrier russe
Ce sont les éclairs précurseurs de l'insurrection qui va éclater quelques jours plus tard. Le parti Bolchevik temporise.
23 février calendrier russe (8 mars calendrier moderne).
Lock-out des usines Poutilov.
Révolution russe de février (- 2 mars, calendrier russe)
Début du mouvement populaire à Petrograd.
A Petrograd, pour la journée internationale des femmes, les femmes manifestent spontanément dans les faubourgs de Petrograd pour réclamer du pain, le retour de leurs maris partis au front mais aussi l’égalité des sexes.
Des ouvriers de la métallurgie et du textile se mettent en grève et les rejoignent.
100.000 ouvriers pétersbourgeois se mettent en grève pour se solidariser avec leurs camarades des usines Poutilov “lockoutés”[2].
On conspue la guerre et l’autocratie.
Les manifestants cherche à fraterniser avec les troupes chargées de la répression.
Bien que dissoute, la Douma siège sans désemparer. Les députés de gauche prononcent des discours appelant ouvertement au renversement de la monarchie.
C'est le premier jour de la Révolution russe. Cette date sera reprise par la IIIe Internationale comme date pour la journée des femmes.
> 24 février calendrier russe (9 mars)
Les évènements se précipitent. La moitié du prolétariat de Saint-Pétersbourg a cessé le travail. La foule ne cesse de grossir. Près de 150.000 ouvriers grévistes convergent vers le centre-ville.
Les slogans se durcissent, on chante la Marseillaise.
Débordés, n’ayant reçu aucune consigne précise, les cosaques de la garde ne parviennent plus à disperser la foule des manifestants et hésitent à charger.
Des centaines d’attroupements se forment, des meetings s’improvisent.
Dans les usines, où de tient parfois des élections de délégués.
25 février calendrier russe (10 mars)
La grève s'étend et devient générale à Petrograd. Des soldats et des marins se joignent à l’insurrection ouvrière. Des soldats sympathisants tirent en l’air.
La situation devient incontrôlable.
Les bolcheviks sont les principaux organisateurs des grèves et des cortèges. Mais ils refusent de distribuer des armes.
Nicolas II, installé loin de la capitale, au quartier général de Moguilev, est très mal renseigné sur l’ampleur de la situation. Il refuse toute négociation et se contente d’envoyer un télégramme pour ordonner à la troupe de «faire cesser par la force, avant demain, les désordres à Petrograd».
Des révolutionnaires sont arrêtés dont la plupart des bolcheviks du comité de Pétrograd.
26 février calendrier russe (11 mars).
La foule est encore plus nombreuse à Petrograd que la veille.
Des unités de combat prennent position face aux manifestants.
Heurts violents entre manifestants et l'armée. Plus de 150 manifestants tués.
Un événement survient qui va faire basculer le pays dans la révolution. Une compagnie de soldats se mutine. Des soldats refusent de réprimer la foule et commencent à passer dans le camp des manifestants. l’une après l’autre, toutes les forces de l’ordre appelées en renfort vont se disperser dans la foule.
Le bureau bolchevique dirigé par Chliapnikov conseille aux ouvriers la prudence.
Le tsar proclame l'état de siège, dissout la Douma et nomme un comité provisoire. Les députés acceptent de se disperser mais pas de quitter la ville.
Dans la nuit du 26 au 27 février en Russie (12 mars), mutinerie de deux régiments d’élite, traumatisés d’avoir tiré sur leurs « frères ouvriers ». En quelques heures, la mutinerie fait tache d’huile.
27 février selon le calendrier russe (12 mars).
Au matin, soldats et ouvriers fraternisent, prennent l’arsenal, où ils s’emparent de dizaines de milliers de fusils, aussitôt distribués à la foule, occupent les points stratégiques de la capitale.
des hommes armés courent vers les prisons et libèrent les détenus.
Les régiments fraternisent avec les insurgés, entraînant toute la garnison de Petrograd qui est forte de 150.000 hommes.
Prise de l'arsenal et du Palais d'Hiver par la foule. Le drapeau rouge flotte sur le Palais d’Hiver.
Le gouvernement est paralysé.
Au palais de Tauride, les députés de la Douma débattent pour savoir s’il faut rompre avec la légalité. La foule des émeutiers, déferle dans l’hémicycle réclamant des députés qu’ils se prononcent clairement contre le tsar et son autocratie.
La Douma élit un comité provisoire regroupant toutes les factions anti-monarchistes. Il est censé incarner le pouvoir légitime aux yeux de tous.
Au même moment, des comités d’ouvriers, de soldats et d’ex prisonniers politiques appelés soviets s’installent dans une autre aile du Palais Tauride. Dans l’après-midi, une cinquantaine de militants de tendances révolutionnaires différentes – bolcheviks, mencheviks, socialistes-révolutionnaires, mettent sur pied un comité exécutif provisoire des députés ouvriers. Ce comité appelle les ouvriers et les soldats de la garnison à élire leurs représentants.
Mise en place d’un double pouvoir qui se côtoie dans la maison de la Douma :
A 18 h 30, démission du gouvernement Galitzine.
Les insurgés sont maîtres de la ville. De nombreux édifices publics sont en flamme, commissariats, arsenals, palais de justice, bâtiments de la police secrète.
28 février selon le calendrier russe (13 mars).
Les ministres tsaristes sont arrêtés.
La forteresse Schlüsselburg est prise.
Deuxième séance plénière du Soviet des députés ouvriers de Petrograd (600 délégués), dirigé par un comité exécutif présidé par le menchevique Tchkhéidzé. Le soviet, imité de celui de 1905, élu par les ouvriers et les soldats, réclame une République socialiste.
Mars 1917 (calendrier russe)
1er mars selon le calendrier russe (14 mars).
Nicolas II, tardivement informé des évènements de Petrograd, quitte précipitamment son quartier général de Moguilev. Le train qui le ramène est arrêté par les cheminots révolutionnaires à 270 kilomètres de la capitale.
Les généraux soumettent au tsar un projet de réforme institutionnelle qui lui permettrait de reprendre la main sur les forces insurrectionnelles.
Mais les insurgés de Petrograd exigent qu'il abdique.
À Petrograd, des centaines de soviets, des milliers de comités d’usine fleurissent. Les soldats ont maintenant une représentation importante dans le soviet de Petrograd qui devient le Soviet des députés ouvriers et soldats.
Le soviet de Petrograd promulgue le Décret numéro 1 (prikaz), véritable charte des droits du soldat. Ce texte abolit les règles de discipline militaire les plus vexatoires de l’ancien régime et permet aux soldats-citoyens de s’organiser en comités de soldats.
Le Soviet de Moscou tient son premier meeting.
2 mars calendrier russe (15 mars)
Une délégation du Comité se rend près du tsar Nicolas II à Pskov, exigeant son abdication.
Lâché par ses généraux, Nicolas II abdique en faveur de son frère, le Grand-duc Michel. La monarchie russe a cessé d’exister.
Toute la famille du tsar est placée en résidence surveillée.
La nouvelle de l’abdication de l’empereur est accueillie par une immense liesse populaire. La rue exulte, la foule de Petrograd fête la victoire.
Entre le Comité provisoire de la Douma et le Soviet de Petrograd, de longues négociations aboutissent à un compromis.
Le soviet reconnaît, en attendant la convocation d’une Assemblée constituante, la légitimité d’un nouveau gouvernement provisoire à majorité libérale, composé, pour l’essentiel, de représentants du Parti constitutionnel-démocrate. Cette reconnaissance reste subordonnée à l’application, par le gouvernement provisoire, d’un vaste programme de réformes démocratiques, fondé sur l’octroi des libertés fondamentales, le suffrage universel, l’abolition de toute forme de discrimination, la suppression de la police, la reconnaissance des droits du soldat-citoyen et une amnistie immédiate de tous les prisonniers politiques.
Formation d’un gouvernement provisoire libéral, constitué essentiellement de députés du KD.
Il est présidé par le prince Lvov (grand propriétaire terrien monarchiste).
Prince Lvov
Kerenski, ancien avocat, est ministre de la Justice.
Milioukov, ministre des Affaires étrangères, gouverne.
Le gouvernement provisoire a une majorité de Cadets et une participation de mencheviques.
Le parti bolchevique s'engage dans une politique de soutien critique au gouvernement provisoire.
Les mencheviques, qui considèrent la révolution russe comme une révolution bourgeoise devant ouvrir la voie au développement du capitalisme en Russie et à la démocratie parlementaire, ont la même position.
La situation de double pouvoir perdure entre le gouvernement provisoire et le soviet de Petrograd. Celui-ci contrôle l’armée, l’armée, les usines et le voies ferrées et a le soutien des ouvriers.
Le 3 mars calendrier russe (16 mars calendrier moderne).
Le grand-duc Michel, jugeant la situation incontrôlable refuse la proposition des libéraux de sauver la dynastie des Romanov en prenant la place de Nicolas II.
Fin de la dynastie des Romanov.
Un République de fait s'installe mais la guerre continue.
4 mars calendrier russe (17 mars).
Lénine rédige l’ébauche des Thèses d’avril où il parle de la nécessité d’établir en Russie un gouvernement ouvrier et paysan s’appuyant, primo, sur l’immense majorité de la population paysanne et, secundo, sur l’alliance avec les ouvriers révolutionnaires de tous les pays belligérants.
Le nouveau ministre des Affaires étrangères, Pavel Milioukov, adresse une note aux Alliés dans laquelle il dit la détermination du nouveau gouvernement russe de poursuivre la guerre jusqu’à la victoire et l’annexion de Constantinople.
5 mars calendrier russe (18 mars)
Re-publication de la Pravda, l’organe central des Bolcheviques.
6 mars calendrier russe (19 mars).
Publication du programme du gouvernement provisoire : amnistie pour les prisonniers politiques, convocation d'une assemblée constituante élue au suffrage universel, poursuite de la guerre.
Le gouvernement s'engage à respecter les accords contractés avec les Alliés et à mener la guerre jusqu'à la victoire.
Les prisonniers politiques sont amnistiés par le Gouvernement provisoire.
7 mars calendrier russe (20 mars).
Le tsar et la tsarine sont mis en état d’arrestation par le gouvernement provisoire au Palais Alexandre, Tsarskoïe Selo.
8 mars calendrier russe (21 mars).
Le tsar Nicolas II est arrêté à Moghilev et est transféré pour être confiné dans sa prison dorée de Tsarskoïe Selo.
Nicolas II
10 mars calendrier russe.
Kerenski, ministre de la Justice, menchevik qui a fait abolir la peine de mort, rencontre le tsar dans son palais.
11 mars calendrier russe.
Reconnaissance du gouvernement provisoire par les Alliés.
12 mars calendrier russe (25 mars).
Retour après déportation à Petrograd de Kamenev et Staline. Ils représentent les bolcheviques au Comité exécutif central des Soviets pendant trois semaines[4].
Réunion d’un Comité temporaire de la Douma dans le but de former un gouvernement provisoire chargé d’organiser des élections.
13 mars calendrier russe (26 mars).
Les dirigeants déportés, libérés par la révolution arrivent à Petrograd. Mouranov, Kamenev, Staline, reprennent le direction de l'organisation bolchevique. Staline prend la direction de la Pravda. Le parti prend une ligne défensive de poursuite de la guerre et se rapproche des mencheviks. Une minorité résiste (Chliapnikov, Kollontaï).
14 mars selon le calendrier russe (27 mars).
Dans son Appel aux peuples du monde entier, le soviet de Petrograd se prononce pour une «paix sans annexions ni contributions». Il prône le « défensisme révolutionnaire », qui s’efforce de concilier la «lutte des peuples contre les ambitions annexionnistes de leurs gouvernements» et le «maintien d’une politique défensiste préservant la combativité de l’armée».
20 mars selon le calendrier russe.
Introduction de l'égalité des droits politiques et civiques.
27 mars selon le calendrier russe (9 avril).
Trotsky et les siens s'embarquent de New York à bord d’un navire norvégien pour revenir en Russie.
Début du long voyage de retour de Lénine de Suisse (Zurich) à Petrograd à travers l'Allemagne dans un train aux portières fermées, organisé avec l'accord du gouvernement impérial allemand.
Lénine
28 mars selon le calendrier russe (10 avril).
Premier congrès pan-russe des soviets, 3000 participants aux séances plénières.
Conférence des délégués bolcheviques au premier congrès pan-russe des soviets. Mencheviks et S-R sont en majorité. Ils ne cherchent pas à prendre le pouvoir car ils pensent que la classe ouvrière n'est pas mûre.
Lénine quitte Zurich, traverse, dans un wagon bénéficiant du statut d’exterritorialité, l’Allemagne, gagne la Suède.
AVRIL 1917
Des soviets se créent partout. Dans chaque quartier, il y a un comité de quartier.
Les bolcheviks sont majoritaires dans la plupart des soviets.
Parution de l'œuvre fondamentale de Lénine sur l'impérialisme, L'impérialisme, stade sortie du capitalisme.
⇨ Le 3 avril (16 occidental), après 17 ans d’exil en Europe, arrivée de Lénine à Petrograd, venant de Suisse. Des milliers d’ouvriers et de soldats l’attendent à la gare de Finlande, à Pétrograd et l’accueille avec des fleurs et des cris de joie.
Lénine grimpe au sommet d’un wagon blindé pour s’adresser aux milliers de ses disciples qui s’étaient rassemblés.
Son retour va renverser la situation. Le discours qu’il prononce à la gare de Petrograd est en rupture totale avec la ligne suivie jusqu'ici par les bolcheviks. Lénine, que soutiennent Zinoviev et Boukharine, se dresse contre la ligne conciliatrice appliquée par le parti en son absence. Pour lui, la première étape de la révolution est achevée. Il faut maintenant passer à la révolution prolétarienne, il faut sortir de cette guerre infâme, il faut rompre avec le pouvoir bourgeois et donner tout le pouvoir aux soviets.
Publication des Thèses d'avril par Lénine. Il rejette toute collaboration avec le gouvernement provisoire : nationalisation des banques, contrôle ouvrier sur les usines, terre aux paysans, paix immédiate, pouvoir aux Soviets.
Discussion de ces thèses dans le parti (- 07/05). Tout l'appareil du parti rejette les thèses d'avril. Elles sont vivement combattues par Kamenev et Rykov. Les premiers jours, seuls Alexandra Kollontaï, Zalejski et quelques cadres de Pétrograd soutiennent Lénine.
⇨ Le 4 avril (17 occidental). Conférence des organisations bolcheviques de Pétrograd. Lénine réussit à faire approuver ses conceptions (37 voix contre 3) mais la résistance aux idées de Lénine (“A bas le gouvernement provisoire”) reste forte dans le parti.
⇨ Le 7 avril, les thèses de Lénine paraissent dans la Pravda signées de son seul nom.
⇨ Le 18 avril, Pavel Milioukov adresse une note aux Alliés réaffirmant que la Russie combattra «jusqu’à la victoire finale». La position du soviet, pour une «paix sans annexions ni contributions», n’est même pas mentionnée.
⇨ Les 20 et 21 avril, Journées d’avril en réaction à la confirmation par le gouvernement provisoire aux alliés de son engagement dans la guerre. A Petrograd, la rue se mobilise, exigeant la démission de Milioukov. D’imposantes manifestations où, pour la première fois, figurent des mots d’ordre bolcheviques («Tout le pouvoir aux soviets!») contraignent Milioukov et Alexandre Goutchkov, le ministre de la Guerre, à démissionner.
⇨ Le 24 avril (7 mai occidental), début de la VIIe Conférence nationale du POSDR (bolchevique). 149 délégués élus. Lénine est rapporteur et Kamenev présente un contre-rapport. Victoire des thèses de Lénine qui redresse en quelques semaines le parti.
Élection du Comité central de 9 membres avec une représentation pratiquement proportionnelle des tendances.
MAI 1917
Début mai : grandes grèves.
4 mai selon le calendrier russe (17 mai).
De retour de New York, Trotsky arrive à Petrograd.
5 mai selon le calendrier russe (18 mai).
Une crise politique entraîne la formation du second gouvernement provisoire.
Kerenski est ministre de la guerre.
L’entrée de six ministres socialistes révolutionnaires (SR), dirigeants du soviet de Petrograd (dont Tseretelli et Viktor Tchernov) dans le second gouvernement provisoire, remet en question le principe même du double pouvoir. Devenus les gestionnaires de l’Etat bourgeois, les socialistes modérés laissent l’initiative de la contestation aux bolcheviks à un moment où les tensions sociales s’exacerbent.
A la septième conférence du parti bolchevik, Staline résume ses vues sur le problème national : droit absolu pour toutes les nationalités de disposer d'elles-mêmes, jusqu'à y compris la séparation.
JUIN 1917
Les nationalistes ukrainiens proclament une république autonome.
3 juin selon le calendrier russe (16 juin).
Ouverture du Premier Congrès panrusse des Soviets. (- 24 juin).
Il réunit des délégués de toute la Russie. Environ 20 millions de personnes sont représentées par les soviets dont plus de 5 millions d’ouvriers, 8 millions de soldats et 4 millions de paysans[5].
285 délégué socialistes-révolutionnaires, 248 mencheviks et 105 délégués bolcheviques (sur 822). Les conciliateurs arrivent en tête.
Les bolcheviques (Lénine) ont pour mot d’ordre : “Tout le pouvoir au Soviets”. 600 soviets sont représentés.
Tsereteli : “aucun parti n’exprime explicitement le désir de prendre seul le pouvoir”. Lénine : “ Un tel parti existe, nous sommes prêts à prendre le pouvoir”.
Le Congrès s'arroge le pouvoir souverain et désigne un comité exécutif central.
Trotsky est l'un des orateurs révolutionnaire les plus populaires de Petrograd.
5 juin selon le calendrier russe (18 juin).
Grande manifestation de soutien aux Soviets.
18 juin selon le calendrier russe.
Kerinski, ministre de la guerre, est au faît de sa popularité et il en profite pour lancer une nouvelle offensive sur le front, l’offensive Broussilov, de trois semaines contre les armées allemandes et austro-hongroises en Galicie. . Mais la plupart des soldats russes démotivés par cette guerre qui n’est plus la leur se tournent vers les bolcheviks qui sont les seuls à exiger l’arrêt immédiat des hostilités. Ils refusent de monter à l’assaut, retournent leurs armes contre leurs officiers. Dans certains régiments, on fraternise avec les troupes allemandes aux cris de “crosse en l’air”. Les officiers interdisent les fraternisations et tirent sur les soldats qui se congratulent.
L’offensive échoue et doit s'arrêter, en partie faute de matériel militaire.
L'échec de l'offensive marque un tournant dans l'état d'esprit de la troupe. Des soldats se mutinent.
JUILLET 1917
En juillet, fusion du groupe de Trotsky avec les bolcheviques.
Interdiction et répression du parti bolchevique.
Kornilov est nommé commandant en chef de l’armée par le gouvernement de Kerenski. Il essaye de réformer l’armée en limitant les droits des comités de soldats et en réintroduisant la peine de mort pour les déserteurs et les « traîtres ».
L’armée est en décomposition. Les désertions se multiplient.
2 juillet selon le calendrier russe (15 juillet)
Les faubourgs de Petrograd et de Kronstadt commencent à s’agiter.
3 juillet selon le calendrier russe (16 juillet)
Journées de juillet. Les soldats de la capitale refusent de repartir au front. Près d’un million de manifestants, que le parti ne réussit pas à contenir, se répandent dans les rues de Pétrograd et mettent le gouvernement à deux doigts de sa perte.
Le parti bolchevique est divisé.
Kamenev, Zinoviev et Lénine sont réticents à prendre la tête de la manifestation. Ils pensent qu’il est trop tôt, que la situation n’est pas encore mûre pour la prise de pouvoir.
Après deux jours d’émeutes dans les rues de Petrograd et de Moscou, le gouvernement provisoire rétablit l’ordre dans le sang. Les troupes du gouvernement provisoire ouvre le feu : 40 morts et plus de 80 blessés sur la perspective Nevski.
Répression du mouvement ouvrier révolutionnaire par le gouvernement provisoire. Les principaux dirigeants bolcheviks sont arrêtés.
Kerenski forme un “gouvernement de salut révolutionnaire”.
Le gouvernement dénonce Lénine, Trotsky et d'autres bolcheviques comme agents de l'État-major allemand.
Un détachement d'élèves officiers saccage le siège de la Pravda, que Lénine a quitté une demi-heure plus tôt, ce qui lui sauve la vie. Un autre détachement perquisitionne son appartement.
7 juillet selon le calendrier russe.
Début d'une contre-offensive allemande. L’armée russe recule de 300 à 400 kilomètres.
De nombreux dirigeants du parti bolchevique sont jetés en prison (dont Kamenev, Trotsky). Lénine est accusé d’être un espion allemand.
Lénine en se maquillant en pêcheur passe dans la clandestinité et réussit à s’enfuir en Finlande.
Lénine déguisé en pêcheur.
Kerinski prend la tête d’un nouveau gouvernement.
Alexandre Kerensky, compagnon de route bourgeois des SR, forme un nouveau et troisième gouvernement provisoire.
Alexandre Kerenski
15 juillet 1917
Kerenski retourne au Palais pour parler au tsar.
22 juillet 1917
Trotsky est arrêté par le gouvernement provisoire.
23 juillet
Trotsky se déclare solidaire de Lénine.
Pour le gouvernement, il s’agit donc consolider le régime en le maintenant dans la guerre. La peine de mort est rétablie pour les tribunaux militaires.
26 juillet selon le calendrier russe (8 août).
Début du VIe congrès du parti bolchevik, dit "d'unification" (- 3 août).
Ni Lénine ni Trotsky (en prison) n’y assistent. Adhésion de Trotsky et de l'organisation inter-rayons qui rejoignent Lénine et le parti bolchevique.
Election d’un Comité central de 21 membres. Trotsky (en prison) y est élu.
Le parti a décuplé ses effectifs, passant à 200 000.
Lundi 31 juillet
Kerinski décide de transférer les Romanov à Tobolsk, une ville de Sibérie occidentale située à l’écart du réseau ferroviaire. Une demeure spacieuse et confortable a été aménagée pour les recevoir.
AOÛT 2017
20 août
Lors des élections municipales de Petrograd, les mencheviks ne recueillent que 5% des suffrages.
21 août (3 septembre occidental).
L'armée allemande occupe Riga.
Lénine plaide contre la majorité du Comité central pour la prise de pouvoir insurrectionnelle.
24 août en Russie (6 septembre).
Avec la complicité du nouveau chef du gouvernement provisoire, Kerinski, le général à poigne Kornilov est envoyé à Petrograd avec une division cosaque et tente un coup d'État que la résistance ouvrière, notamment des cheminots qui entravent la progression des troupes vers la capitale, enraie. Kornilov ainsi que 7 000 de ses partisans sont arrêtés. À la suite de ce coup, l’armée se délite. Des centaines d'officiers sont massacrés dans les jours qui suivent l'échec du putsch.
Trotsky est libéré par les marins de Cronstadt.
Motion bolchevique : gouvernement sans participation bourgeoise.
31 août
Le Soviet de Petrograd vote tout le pouvoir aux soviets.
SEPTEMBRE 2017
Les bolcheviks ont la majorité dans les soviets de Petrograd et Moscou.
Une forte agitation gagne les campagnes.
Attaque allemande sur Riga. Les Allemands occupent Riga.
8 septembre en Russie (21 occidental).
Les bolcheviques deviennent majoritaires aux Soviets de Petrograd et de Moscou.
9 septembre 1917
Trotsky se fait président du soviet de Petrograd.
12-14 septembre (25-29 occidental)
Depuis son exil finlandais, appels de Lénine à la préparation de l'insurrection armée et à la prise immédiate du pouvoir. Le comité central bolchevique est consterné par les demandes de Lénine.
17 septembre
Libéré, Trotsky assiste pour la première fois au comité central bolchevique.
23 septembre
Les articles publics de Zinoviev et Kamenev contre l’insurrection amènent Lénine à demander leur exclusion.
26 septembre 1917
Les bolcheviks sont majoritaires au Soviet de Petrograd. Trotsky en est élu président.
Trotsky
29 septembre
Lénine lance l’avertissement : « La crise est mûre ».
OCTOBRE 1917
Le rouble vaut 10 % de sa valeur de 1914.
De mars à octobre, plus de deux millions de paysans-soldats, fatigués de combattre, ont déserté. Leur retour au village alimente, à son tour, les troubles dans les campagnes.
6 octobre 1917
Trotsky invite le gouvernement provisoire à s'en aller.
La majorité des dirigeants bolcheviques, partisans de jouer le rôle d'opposition parlementaire, sont hostiles à l'insurrection.
7 octobre 1917
Déguisé en machiniste, Lénine rentre à Petrograd et s’y établit clandestinement.
10 octobre 1917 selon le calendrier russe (23 octobre)
Lénine, déguisé et rasé, fait voter au cours d’une réunion secrète du Comité central : "le soulèvement armé est inévitable" (10 voix contre 2). Trotsky vote pour. Zinoviev et Kamenev s'y opposent publiquement. Le comité central refuse leur exclusion que réclame Lénine. Staline plaide pour la conciliation.
Les bolcheviks ont voté l’insurrection.
15 octobre 1917
Le comité bolchevique de Moscou refuse d'organiser pratiquement l'insurrection.
16 octobre 1917 calendrier russe
Nouvelle réunion du Comité central bolchevique élargi. Kamenev, attentiste, ne veut pas d’insurrection dans l’immédiat. Il démissionne du comité central.
Le Soviet créé son Comité militaire révolutionnaire. Trotsky en est le chef.
18 octobre 1917
Kamenev et Zinoviev font une dernière tentative pour contrecarrer le d'insurrection. Lénine demande leur exclusion.
20 octobre 1917
Staline plaide la conciliation avec Kamenev.
21 octobre 1917
Kerinski donne l’ordre à deux-tiers de la garnison de Petrograd de quitter la ville pour monter au front. Le Soviet de Petrograd présidé par Trotsky invalide cette décision. Trotsky incite les soldats à désobéir.
Cette rebellion marque le premier acte de la révolution d’Octobre.
> Le 22 octobre 1917, le croiseur Aurora reçoit l’ordre des bolchéviques de rester sur place.
> 24 octobre 1917 selon le calendrier russe (6 novembre calendrier moderne).
Le comité central du parti bolchevique hésite encore à sauter le pas de la prise du pouvoir.
Lénine pense qu'il ne faut plus attendre au risque de tout perdre. Il rédige une lettre aux membres du comité central : « Maintenant, retarder l’insurrection, c’est la mort », « Ce soir, cette nuit, arrêter le gouvernement », « l’histoire ne pardonnera pas l’ajournement ».
Les ministres du gouvernement provisoire font apposer des scellés sur les bureaux de deux journaux bolchéviques.
Le mécanisme de l'insurrection est déclenché. Les détachements ouvriers sont armés.
> Le 25 octobre 1917 selon le calendrier russe (7 novembre).
Dans la nuit, Trotsky s'assure de l'appui de la garnison en lui rappelant que Kerenski veut l'envoyer au front.
Insurrection à Talin en Estonie.
Insurrection et prise de pouvoir.
> A 10h, le gouvernement provisoire est déclaré dissous par le comité révolutionnaire de Petrograd.
C'est un comité révolutionnaire provisoire qui la dirige au nom du soviet de Petrograd. Plusieurs centaines de soviets de la capitale y participent.
La Garde rouge et les unités de la garnison s'emparent des édifices publics (gares, centraux téléphoniques et électriques, banques, ministères, postes de police).
Plusieurs centaines de soviets de la capitale et de la région participent à l’action[6].
> Le soir, ouverture à l’institut Smolny du IIe Congrès panrusse des Soviets (majorité bolchevik : 390 sièges sur 650).
1.500 soviets sont représentés.
Kamenev est proposé à la présidence.
Menchevils et bolcheviks s’affrontent pour savoir s’il faut en finir avec le gouvernement provisoire.
Mis en minorité, les mencheviks quittent la salle. Trotsky les invective.
Lénine donne l’ordre de lancer l’assaut sur le Palais d’Hiver où siège le gouvernement.
> A 18h, le palais d'hiver de Saint-Pétersbourg, siège du gouvernement provisoire, est bombardé avec quelques coups de semonce par l'Aurora venu de Cronstadt. Un groupe de soldats fait irruption dans la cour d’honneur. Les troupes chargées de défendre le palais opposent une défense très modérée.
> A 20h40, Kerenski s'enfuit pour aller chercher des renforts.
>26 octobre 1917 selon le calendrier russe (8 novembre).
> Vers 2 h du matin, dans la nuit du 25 au 26 octobre, les gardes rouges pénètrent dans la salle où siègent les ministres qui sont arrêtés. Le palais est pris.
A l'institut Smolny, l’annonce de la dissolution et de l’arrestation du gouvernement provisoire déclenche un tonnerre d’applaudissements chez les délégués des soviets.
Lénine fait lire son “Manifeste aux ouvriers, soldats et paysans”.
Le Congrès des Soviets où les bolcheviks sont majoritaires, adopte un décret proposant la paix immédiate sans annexion à tous les belligérants et un décret attribuant la terre en usufruit aux paysans, un décret sur les nationalités, un décret sur le contrôle ouvrier de la production.
Grâce à ces décrets, les bolcheviks obtiennent un réel soutien parmi la troupe.
Le Congrès des soviets désigne un Conseil des commissaires du peuple (Sovnarkom) (président : Lénine, Affaires étrangères : Trotsky, nationalités : Staline).
Conseil des commissaires du peuple
Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, les classes prolétaires viennent de s’emparer du pouvoir central d’un empire.
Octobre n'est pas un simple "coup d'Etat", car il se traduit non pas par un simple changement de personnel politique mais par le remplacement de la classe au pouvoir par une autre, par le changement des formes et des rapports de propriété, par le bouleversement des institutions politiques, une monarchie vaguement parlementaire étant remplacée par des Soviets[7].
26-27 octobre (8-9 novembre).
Lénine président du conseil des commissaires du peuple, élu par le IIe congrès panrusse des soviets.
Alexandra Kollontaï devient Commissaire du peuple à l'Assistance publique (ministre de la Santé), première femme au monde à faire partie d'un gouvernement.
29 octobre
Début du Vote pour l'Assemblée constituante. 44 millions de personnes vont voter.
NOVEMBRE 1917
Maintenant qu’ils ont obtenu le pouvoir, les bolcheviks doivent obtenir la paix qui a été promise.
1er novembre 1917 (au calendrier russe, 14 au calendrier moderne).
Les Soviets d'entreprise reçoivent l'autorité de gestion.
Staline, commissaire aux nationalités, signe avec Lénine un décret : droit des peuples à disposer librement d'eux-mêmes y compris la séparation totale et la constitution d'un Etat indépendant.
4 novembre 1917 (au calendrier russe, 17 au calendrier moderne).
Démission des dirigeants bolcheviques partisans d'un gouvernement de coalition des partis socialistes (bolcheviks, mencheviks, S-R).
14 novembre 1917
Les Austro-Allemands, intéressés par l'abandon du front est, répondent favorablement aux propositions soviétiques de négociations.
L'Allemagne accepte de négocier un armistice avec le Russie.
16 novembre 1917
Trotsky se rend au quartier général allemand de Brest-Litovsk pour négocier avec le haut commandement les termes d’un armistice.
La stratégie de Trotsky est de gagner du temps.
22 novembre (au calendrier russe, 5 décembre au calendrier moderne). Trêve signée avec l'état-major allemand et autrichien.
Fin novembre et en décembre, les grandes villes sont enlevées à l'administration menchevik. Coups de main des gardes rouges et des garnisons bolchéviques (ex : action de Boukharine à Moscou).
DÉCEMBRE 1917
Gouvernement de coalition : bolcheviks + s-r de gauche (- 03/1918).
Boukharine devient rédacteur en chef de la Pravda – poste qu'il occupera dix ans.
Le 2 décembre (au calendrier russe, 15 au calendrier moderne), l'armée russe continue à se disloquer. Armistice germano-russe.
Début des négociations de Brest-Litovsk. En position de force, les Allemands exigent la Pologne russe et les pays baltes.
Trotsky fait traîner en longueur les négociations dans l'espoir qu'éclate la révolution en Allemagne et en Autriche avec l’espoir d’aboutir bientôt à la révolution mondiale.
Mais la menace d'invasion allemande peut ruiner les espoirs de révolution socialiste.
Lénine, plus pragmatique, jugeant la révolution européenne embryonnaire, veut signer la paix tout de suite.
Trotsky veut démobiliser l'armée sans signer ("Ni guerre, ni paix").
Le 6 décembre 1917 (19 décembre) le gouvernement bolchevique dissout le Comité militaire révolutionnaire.
⇨ Le 7 décembre 1917 (20 décembre occ.) constitution par Lénine de la Tcheka, commission extraordinaire panrusse pour la répression de la contre-révolution et du sabotage, police politique qui agit en dehors de toute légalité. Il imagine cette mesure comme temporaire.
La Tchéka ne comprend à sa création que 600 militants bolchéviques.
Lénine place à sa tête Félix Dzerjinski, 40 ans, fils d’aristocrate polonais, qui a passé 11 ans en prison ou en exil. Dzerjinski a été éduqué dans un milieu catholique très strict. C’est un homme intègre. Il met en place une formidable machine répressive impitoyable et au-dessus des lois.
En un an, elle aura 200.000 membres, c’est un Etat dans l’Etat.
> Le 9 décembre 1917, ouverture des pourparlers de Brest-Litovsk.
> Le 13 décembre, un décret met à la disposition des représentants à l'étranger du commissariat aux Affaires étrangères deux millions de roubles pour les besoins du mouvement révolutionnaire.
[1] Jean-Jacques Marie, Staline, Librio.
[2] Le Léninisme sous Lénine. Marcel Libeman. Seuil.
[3] Nicolas Woerth.
[4] Jean-Jacques Marie, Staline, Librio.
[5] Marc Ferro
[6] Marc Ferro, Des soviets au communisme bureaucratique, coll. " Archives ", Gallimard, Paris, 1980.
[7] Jean-Jacques Marie, Staline, Librio.