L’Irlande au XIXe siècle
L'Irlande est sous la domination britannique depuis sa conquête et sa colonisation au XVIe siècle et XVIIe siècle.
Du point de vue des Britannique, l’Irlande est une terre à exploiter qui leur appartient.
95 % des terres d’Irlande appartiennent à un petit nombre de propriétaires, pour la plupart protestants et fidèles à la couronne britannique. C’est une classe dominante constituée de grands propriétaires terriens et de familles nobles qui possèdent des domaines, environ 5.000 familles.
Les parlementaires sont issus de ses rangs et souvent cette élite exerce le pouvoir au niveau local.
Les Irlandais travaillent comme métayers pour les propriétaires terriens anglais. L’irlande compte huit millions de métayers pauvres.
Sur ces terres agricoles, l’élite des propriétaires produit une grande quantité de nourriture principalement destinée à la Grande-Bretagne.
1801
Pitt avait promis de donner aux catholiques d’Irlande des droits identiques à ceux des protestants.
Pitt met fin à l'autonomie irlandaise apparente par l'Acte d'union qui met fin au vieux Parlement irlandais et rassemble les deux royaumes en un unique État.
L'Irlande est intégrée au Royaume-Uni, elle en fait maintenant partie intégrante. Les Irlandais sont sujets de l’empire britannique et sont gouvernés depuis Londres.
Le rêve d’indépendance s’éloigne.
Le peuple irlandais devient théoriquement l’égal des Anglais, des Ecossais ou des Gallois. Dans les faits, les catholiques irlandais sont victimes de préjugés et de mépris dans leur propre pays. Ils sont vus comme des bons à rien, des paresseux, des indolents. On dit qu’ils ont besoin d’être dirigés, qu’ils ne prennent pas d'initiative. Ils sont souvent considérés comme des moins que rien.
L'Irlande est représentée au Parlement de Londres par des protestants, mais cette assimilation ne résout pas la question irlandaise.
La Croix de St Patrick est ajoutée à l’Union Jack.
Années 1810
Le mouvement d’émancipation des catholiques, sous la houlette de Daniel O'Connell, conduit la Grande-Bretagne à accorder une plus grande égalité des droits aux catholiques irlandais.
Les catholiques les plus aisés qui peuvent faire des études vont s’élever dans la société. Comme leurs homologues protestants, certains vont acquérir des terres qu’ils louent à des petits fermiers.
1823
Naissance de Patrick Kennedy, fondateur de la dynastie Kennedy à Dunganstown.
1829
En Irlande, première amélioration au régime d'oppression par le vote de l'Acte d'émancipation à la suite de la longue et tenace action de l'avocat O'Connell.
Les lois d'exception contre les catholiques sont abrogées. Les Irlandais peuvent être électeurs, éligibles (le système censitaire écarte cependant tous les Irlandais pauvres) et admissibles aux fonctions publiques.
Années 1830
L'Irlande est le panier à provisions de la Grande-Bretagne.
A la veille de la Grande famine, on exporte chaque année 90 millions d'œufs vers la Grande-Bretagne. Mais aussi du saumon et d’autres poissons, de l'alcool et suffisamment de céréales pour nourrir deux millions de Britanniques.
Karl Marx : L'Irlande est un district agricole de l’Angleterre qu’elle fournit en céréales, en laine, en bétail et en recrues pour son armée.
Mais la modernisation de l'agriculture n’a pas encore eu lieu en Irlande. Le travail est assuré par des millions de petits fermiers, de métayers ou encore de journaliers sans terre. Les fermiers louent de petites exploitations auprès d’un propriétaire tandis que les métayers travaillent dur en échange de cultiver une maigre parcelle sans autre rémunération. Quant aux journaliers, ils en sont eux-aussi réduits à occuper un lopin de terre dénudé.
Malgré leurs faibles moyens, métayers et journaliers peuvent compter sur une ressource nourrissante, la pomme de terre qui se cultive en butte. La pomme de terre se multiplie très facilement, on prélève un fragment et on le replante. Elle pousse sur les sols pauvres.
1837
La Grande-Bretagne militarise considérablement l’île en construisant des casernes. La conquête de l’Irlande a été une affaire de longue haleine et l’armée est là pour contenir les débordements.
Années 1840
Aucun pays dans le monde n’accuse une dépendance aussi forte envers une monoculture, la pomme de terre, que l’Irlande. Le système va droit au désastre.
Bon nombre de négociants et de petits commerçants irlandais achètent des lopins de terre un peu partout dans les villes et les villages. Beaucoup de locataires vivent sur ces terres.
1841
Fondation de la Reipeai Association (contre l'acte d'union).
Le recensement établit la population du Royaume-Uni à un peu plus de 27 millions d’habitants dont environ un tiers d’Irlandais.
La population explose en Irlande, on passe de trois millions d’habitants en 1780 à huit millions en 1841. La pression foncière s'accroît. C’est un déferlement dans les vallées et même dans les zones tourbeuses, dans la Connemara et d’autres régions traditionnellement peu peuplées.
Trois millions de personnes vivent dans des constructions rudimentaires faites de pierres ou de boues. mais les deux millions les plus pauvres du pays habitent dans des taudis qualifiés de quatrième classe. Ces maisons de quatrième classe sont des masures d’une seule pièce, en boue et en matières organiques. Elles n’ont ni fenêtres, ni bois de lit, ni tables, ni chaises. Souvent trois générations vivent entassées là.
L’ouest de l’Irlande est parsemé de hameaux. Ce sont des petites communautés de paysans, sans commerce ni pubs. Ils se regroupent par familles. Ils perpétuent une culture orale extrêmement vivante faite de chants et de danses au sein d’un voisinage très proche. La plupart parlent gaélique irlandais.
Trois millions d’habitants sont rattachés à la classe moyenne. Il s’agit d’agriculteurs aux exploitations plus vastes, de négociants ou encore de commerçants ou professions libérales habitant les grandes villes.
1843
Il y a 15.000 soldats britanniques sur l’île.
Le mathématicien Hamilton invente le quaternion, entité mathématique qui est une généralisation à quatre dimensions des nombres complexes.
1844
Les siècles de domination britannique ont entraîné un déclin de la langue irlandaise. Mais celle-ci prévaut encore parmi les plus pauvres et les illettrés. Cette langue celtique s’accompagne d’une culture riche en récits, en poèmes et en chants. Asenath Nicholson, une philanthrope américaine qui parcourt l’Irlande, en relève la vitalité.
Cette culture va disparaître partiellement avec la famine.
1845
La Grande Famine (- 1852). L’Europe est frappée par la famine. En cause, un champignon de la pomme de terre, le mildiou, venu d’Amérique du Sud qui ravage les cultures de pommes de terre. Toutes les régions d’Europe où la pomme de terre occupe une place importante dans les assiettes sont touchées par une grave crise alimentaire. La famine va faire environ 100.000 victimes sur le continent, notamment en Belgique, aux Pays-Bas et dans le royaume de Prusse.
En Irlande, où un tiers de la population dépend quasi exclusivement de la pomme de terre pour se nourrir, la famine va durer sept longues années. La catastrophe va tuer un habitant de l’île sur huit, ce qui en fait l’une des plus terribles famines de l’histoire mondiale. La Grande famine bouleverse l’Irlande : un million de morts, deux millions d’émigrés. La Grande famine tue avant tout les plus pauvres.
La politique de non intervention du gouvernement britannique aggrave la crise. Tout au long des années de famine, l’Irlande est obligée d’exporter vers l’Angleterre de grandes quantités de produits tels que le blé ou la viande. Les métayers qui ne sont pas en mesure de fournir les quantités demandées sont chassés de leurs terres et de leurs maisons. Pendant la Grande famine, les importations britanniques de blé irlandais atteignent des chiffres records[1].
D’innombrables réfugiés irlandais embarquent sur les océans dans l’espoir de bâtir une nouvelle vie ailleurs.
⇨ Au cours de l’été 1845, le parasite Phytophthora infestans, apparu dans la Cordillère des Andes, atteint le port d’Anvers. C’est le moment où les pommes de terre arrivent à maturité. Balayant la Belgique, les Pays-Bas, la France et la Prusse, le mildiou détruit toutes les récoltes sur son passage. Face au risque de crise alimentaire qui menace des millions d’habitants, les gouvernements européens réagissent. Les Belges et les Français prennent des mesures qui ont été appliquées en Irlande au cours des précédentes famines : il suspendent l’activité brassicole et l’utilisation non alimentaire des cultures agricoles. Dans le même temps, ils encouragent les importations et limitent les exportations.
En Irlande, le climat humide favorise une propagation accélérée du mildiou. Les feuilles noircissent. De vastes étendues plantées de pommes de terre passent en une nuit d’une vaste profusion à une désolation noircie et racornie. Un tiers de la récolte de pommes de terre en Irlande est ravagée, privant un million d’habitants de nourriture, en partie ou complètement[2].
Le premier ministre Robert Peel est résolu à aider l’Irlande malgré la pression des partisans du laisser-faire économique. Son gouvernement crée une mission temporaire qui installe des centaines de comités de secours dans tout le pays. Ces instances bénévoles sont chargées de répartir les céréales bon marché que Robert Peel importe des Etats-Unis et de lancer des chantiers publics qui permettront aux indigents de gagner de quoi acheter à manger. Le message est limpide : s’ils veulent bénéficier de ces subsides, les pauvres doivent travailler. Selon les politiques économiques libérales, lorsque que l’on donne aux gens des aides sans contrepartie d’un travail productif, on crée une classe de parasites.
⇨ A l’hiver, bien qu’elles s’accompagnent de conditions sévères, les mesures de Peel portent leurs fruits. La famine ne fait pas de victimes à l’hiver. Les gens réussissent à tenir en vendant leur cochons, en mettant en gage leurs vêtements, voire en ne payant pas leur fermage.
1846
En Grande-Bretagne, l’action de Robert Peel en Irlande est vivement critiquée. Le système d’aide de Robert Peel serait trop généreux et corrompu. Peel sait qu’il prend un risque et met en péril sa carrière politique.
⇨ En juin 1846, la famine en Irlande force le Premier ministre conservateur, Robert Peel, à réagir et à obtenir la disparition des corn laws pour faire baisser le prix des denrées alimentaires. Elles taxaient les importations de blé étranger. Ces barrières douanières avaient permis à l'Angleterre de mettre son agriculture à l'abri de la concurrence mondiale.
Le 29 juin 1846, la loi passe mais Peel doit démissionner face à la colère de son parti conservateur. Il est remplacé par John Russel (whig, libéral).
Quand Russel accède au pouvoir la famine n’est pas sa priorité. Il pense qu’elle sera finie à l’été, conformément aux prévisions.
Mais le mildiou fait un retour en force et, cette fois, il dévaste la quasi-totalité des cultures.
⇨ Fin juillet 1846, 75 à 80 % de la récolte de pommes de terre est détruite en une semaine. L’odeur nauséabonde dégagée est à la limite du supportable.
C’est la première année de famine grave et prolongée.
L’Irlande est dans un piteux état. Pour les paysans, il ne reste plus rien à monnayer ou à engager. Les gens ratissent le littoral à la recherche de quelque chose de comestible. La seule nourriture accessible sont les algues. Dans les familles, on fait des choix épouvantables pour savoir qui on doit laisser vivre ou sacrifier.
⇨ A l’automne 1846, une nouvelle université s’ouvre à Cork, sur la côte sud de l’Irlande. Elle recherche des professeurs. George Boole (1815-1864), 35 ans, envoie sa candidature. Comme il n’a pas de diplômes universitaires, il cherche des lettres de recommandation. Il en obtient des meilleurs mathématiciens de l’époque. Boole quitte sa famille du Lincolnshire et pour la première fois se consacre entièrement à ses recherches.
La reine Victoria doit visiter l’Université de Cork pour son inauguration mais elle doit y renoncer à cause du choléra qui règne sur la ville.
⇨ A la fin de l’automne 1846 et au début de l’hiver, le nombre de morts bondit.
La première cause de décès durant la famine ce sont les infections qu’elle favorise : typhus, fièvre typhoïde, choléra, etc. Ces maladies se répandent facilement dans les villes et les villages densément peuplés.
Des familles entières sont emportées brutalement. Tous les jours, des charrettes viennent déposer les corps dans les cimetières. Pour aller plus vite, on les enterre dans des fosses communes.
Les membres du gouvernement s’alarment des sommes dépensées pour aider l’Irlande.
L’Irlande est considérée par les Anglais comme un territoire surpeuplé. Les politiciens les plus sanguinaires affirment sans ambages qu’il faut laisser les Irlandais mourir de faim.
Dans les sphères du pouvoir, certains voient dans cette famine l’occasion de moderniser l’Irlande et de réduire sa surpopulation pauvre. Sir Randolph Routh, président de la commission de secours : Il est très probable que nous puissions tirer parti de cette calamité. Les Britanniques veulent se débarrasser d’une population trop nombreuse, instaurer des méthodes d’agriculture modernes et accélérer la conversion de l’Irlande en une version de l’Ecosse ou du Pays de Galles qui pourrait ensuite être absorbée pacifiquement.
⇨ Quand arrive l’hiver, des milliers de personnes meurent chaque semaine.
Pourtant le gouvernement Russel met fin aux distributions de céréales à bas prix.
Les seules aides qui subsistent sont les emplois dans les travaux publics. Mais les salaires versés sont maigres alors que le prix des denrées alimentaires est à la hausse à la suite de la crise de la pomme de terre.
L’hiver est le plus froid depuis un siècle.
Même au plus noir de ces années de crise, les marchés restent approvisionnés en Irlande et le pays continue de vendre des denrées alimentaires à la Grande-Bretagne. Des troupeaux de boeufs continuent à être expédiés vers Liverpool. Aux yeux de certains, il est essentiel de poursuivre les exportations afin de maintenir l’activité économique. Les denrées alimentaires quittent le pays.
Au début de la crise, la grogne du peuple est tangible, elle se retourne vers les boulangers et les petits commerçants. Les villes et villages sont pris d’assaut et pillés par des travailleurs au chômage qui sont affamés faute de pain et montrent la plus grande détermination. Ces manifestations se déclenche spontanément et n’ont qu’un seul objet : la pénurie de nourriture.
1847
La mort n’épargne plus aucune région de l’île. Le sud et l’ouest sont les plus touchés. On enterre les cadavres dans les bois quand les proches sont trop faibles pour les porter au cimetière.
Les familles ne pouvant plus travailler ni payer leur loyer, un nouveau fléau fait son apparition : les expulsions. En ville, les réfugiés s’entassent dans des baraques insalubres. On dérobe du bétail et des moutons.
Il y a 29.000 soldats britanniques sur l’île. Leur nombre a doublé depuis 1843.
Amendement à la loi sur les pauvres. Sur les chantiers publics d’infrastructures créés par Robert Peel, le travail est pénible et la rémunération faible, de quoi s’assurer que seuls les plus désespérés se porteront candidats : Le travail doit être aussi rebutant que possible, dans des limites humaines. Ce doit être le dernier recours avant de mourir de faim.
Le salaire du travail sur les chantiers d’infrastructures est diminué de 20 %.
Sir Charles Wood, chancelier de l’Echiquier : Selon moi, seul le passage par le purgatoire de la misère et de la famine peut assurer en bout de course un semblant de prospérité à l’Irlande.
Dans l’année, le port de Liverpool, sur la côte ouest de l’Angleterre, voit arriver 300.000 réfugiés irlandais dans la misère. Plus de 300.000 Irlandais fuyant la famine vont s’installer dans des villes britanniques. Ils sont illettrés pour la plupart et ne parlent que gaélique. Ils se retrouvent absorbés dans la classe ouvrière des grands pôles urbains.
⇨ En mars, les projets de chantiers d'infrastructures, destinés à moderniser le pays, emploient 700.000 travailleurs. Le long des côtes, des installations portuaires sont construites ou rénovées. De vastes systèmes de drainage font leur apparition dans le centre et l’ouest du pays. De nouvelles routes sont bâties, permettant parfois de raccourcir un trajet de plusieurs jours. Mais la majorité de ces projets ne répond pas à des besoins concrets et beaucoup de routes ne mènent littéralement nulle part. Le pays est parcouru d'innombrables routes inutiles. Les travailleurs ont le ventre vide et se retrouvent souvent loin de chez eux. Trop faibles pour rentrer à la maison chaque soir, ils dorment sur place, à la dure, exposés aux éléments. On les tuent à petit feu.
Quand la population comprend que la situation est sans issue, l'instinct de rébellion qui l’a poussée à chercher des solutions cède la place à l’apathie, à la résignation et au désespoir.
Tandis que la puissance publique se désengage, ce sont des individus, médecins ou ecclésiastiques, ou encore des œuvres de bienfaisance indépendantes qui tentent de pallier les insuffisances en première ligne. Le mouvement quaker, ou Société religieuse des amis, mène notamment une action importante. L'Irlande compte environ 3.000 quakers. Ils jouent un rôle actif dans la mise en place de soupes populaires dans tout le pays.
⇨ En juin, le gouvernement annonce la fin des chantiers publics. A la place, des soupes populaires sont établies pour nourrir gratuitement les plus pauvres.
L’été apporte un répit car le mildiou ne revient pas mais les agriculteurs n’ont pratiquement pas replanté de pommes de terre et la récolte est maigre. Les plus pauvres ne survivraient pas sans les repas gratuits.
On déclare la fin de la famine et qu’aucune aide supplémentaire ne se justifie. C’est une erreur. Le gouvernement ferme les soupes populaires abandonnant quatre millions de personnes à leur sort. C’est une décision cruelle qui a elle seule est à l’origine d’une vague de décès. Londres cesse d’accorder des subsides et des prêts publics.
Le Comté de Cork est particulièrement atteint par la misère.
1848
Le mildiou continue ses ravages. Les morts, les expulsions et les départs se poursuivent. Les années les plus meurtrières de la famine commencent.
Les organismes d’aide aux pauvres commencent à faire faillite.
Les plus misérables sillonnent les routes, dans les villes ils trouvent portes closes.
Le taux de criminalité explose. Des affamés tuent pour pouvoir manger.
Il y a des cas d'anthropophagie.
Les expulsions se multiplient pratiquement dans tout le pays. La noblesse, qui possède 95 % des terres en Irlande, est à l’origine de la plupart des expulsions. Les propriétaires fonciers font raser les masures et expulsent les occupants de leur terres. Armée de mousquets et de baïonnettes, la police exécute les expulsions à contre-coeur. Les locataires opposent une certaine résistance car leurs taudis ont été construits par eux ou par leurs ancêtres. Les forces de l’ordre mettent le feu aux toits pour que les occupants ne puissent pas revenir. Les gens trouvent refuge sur les plages, dans les fossés, n’importe où.
Des familles s’installent le long des haies et des fossés.
Certains propriétaires se montrent plus charitables, donnant de la nourriture à leur locataires et annulant leur loyer.
A force de départ, des villes et des villages entiers disparaissent.
⇨ Le 28 juillet, des nationalistes irlandais se rassemblent près du village de Ballingarry, dans le comté de Tipperary. Ils comptent sur la mobilisation des masses pour les soutenir. Mais les masses sont des paysans affamés et ils sont désarmés.
Après une escarmouche qui oppose les insurgés à la police, les troupes britanniques sont envoyées sur place et arrêtent les participants. Les meneurs sont condamnés à mort mais la sentence ne sera pas exécutée en gage d’apaisement.
Comme beaucoup d’autres rébellions qui émaillent l’Europe cette année, cet incident ne va porter ses fruits que longtemps après.
La tentative de soulèvement irlandais braque un peu plus l’opinion britannique. Londres décide de ne plus s’occuper de la situation irlandaise.
1849
Le mildiou revient.
Les expulsions se poursuivent.
La famine est loin d’être finie, elle reflue mais ne disparaît pas. Des Irlandais continuent à mourir de faim.
Ceux qui sont privés de moyens d’existence n’ont plus qu’une solution, les maisons de travail, des institutions à mi-chemin entre la prison et l’hospice. Pour bénéficier d’une subsistance, il faut accepter le travail forcé et l’enfermement. Il y en a 130 en Irlande. Les familles y sont séparées. Hommes, femmes et enfants vivent dans des quartiers distincts et n’ont pas le droit de se parler. Un million de personnes y travaillent. Plus de 200.000 personnes vont y mourir.
Milieu du XIXe siècle
Tous les nécessiteux sont mal considérés, mais les Irlandais pauvres le sont encore davantage.
Beaucoup d’Irlandais émigrent aux Etats-Unis. Ils s’installent pour la plupart dans les États de l’Est. La majorité sont très jeunes. C’est un exode sans précédent. En une décennie, près d’un million et demi d’Irlandais vont gagner les Etats-Unis et 340.000 le Canada. 50.000 mettent le cap sur la Nouvelle-Zélande et l’Australie.
1850
Années de famine.
1851
Années de famine.
1852
La crise alimentaire se termine. Près de 50 % de la population a disparu dans certaines régions. La famine a fait 700.000 morts dans les provinces de Munster et Connacht. L’Ulster n’est pas en reste avec plus de 170.000 victimes, essentiellement parmi les pauvres, protestants comme catholiques. Dans la quasi-totalité des villes, la population a chuté de moitié. Dans de grandes parties de l’ouest et du sud-ouest, il n’y a pratiquement plus d’enfants. Le pays va mettre plus d’un siècle à s’en remettre. En tout, un million de personnes ont trouvé la mort. En une demi-décennie, deux millions d’Irlandais se sont expatriés définitivement. C’est l’anéantissement de tout un peuple.
1858
Fondation de la Fraternité républicaine irlandaise (IRB), société secrète américano-irlandaise, qui cherche à renverser par la force l'autorité britannique pour instaurer une république irlandaise indépendante et démocratique. Ses membres sont appelés les "Féniens".
Années 1860
Les gens se réunissent de nouveau comme ils en avaient l’habitude. La population est traumatisée par les horreurs qu’elle a traversé. Elle essaye de survivre. La poésie, la musique et la danse se sont arrêtées. La famine a tout anéanti.
Les grosses fermes s'étendent et absorbent les domaines voisins.
1866
Gladstone défend une autonomie partielle pour l’Irlande, le Home Rule, mais sa loi est rejetée.
Années 1870
Le parti parlementaire irlandais plaide à Westminster pour que la Grande-Bretagne accorde à l’Irlande une autonomie partielle.
1870
Projet de Home Rule en Irlande. Il n'est pas appliqué.
Années 1880
L’Irlande voit s’épanouir une génération dynamique de jeunes nationalistes déterminés à enrayer le déclin de leur langue et de leur culture. On assiste à l’essor de toute une culture expérimentale : la Ligue gaélique, l’Abbey theatre de Dublin, le Renaissance celtique.
1881
Chute démographique due à l'émigration. Presque un tiers des Irlandais nés en Irlande vivent à l'étranger.
1884
Création de l’Association athlétique gaélique (GAA) par Michael Cusack. Elle se développe rapidement. Elle promeut la culture et les disciplines locales, notamment le hurling, l’un des sports d’équipe les plus rapides au monde.
1885
En novembre, élection de 86 irlandais au Parlement de Londres.
1886
Campagne de Gladstone (Premier ministre du parti libéral) en faveur du Home Rule (autonomie) en Irlande.
1894
Gladstone se retire de la vie publique sans avoir réussi à faire voter le Home Rule Bill qui aurait de nouveau donné un Parlement à l’Irlande à Dublin.
Fin du XIXe siècle
Les Irlando-américains qui sont aux Etats-Unis commencent à invoquer la famine comme un argument en faveur de l’indépendance de l’Irlande : les Britanniques nous ont laissé mourir ou embarquer sur des cercueils flottants.
[1] Irlande, la frontière de la discorde. Documentaire de Christel Fomm, 2019
[2] La grande famine en Irlande. Documentaire de Ruan Magan. 2020.